Un article pas politique, mais j'ai besoin de le publier...

Jamel, mon oncle, 21 ans, futur professeur de sport qui aime les filles, la musique, sa famille, la vie! Depuis 4 ans mon Tonton est frappé d'un cancer généralisé, il gonfle, il saigne, fait des hémorragies, a du mal à respirer, à manger... Ce matin, je ne sais plus exactement l'heure, Yahya appelle à la maison, les parents sont au marché; pas de nouvelles, il ne se passe manifestement rien "Je rappelerai plus tard" me dit-il. Puis Karima, la femme de Tonton Nasser appelle en larmes, je tremble, mais tout va bien... enfin presque "Les médecins ont dit qu'il devait rentrer chez lui, ils ne peuvent plus rien pour lui", retour à Oujda. Yamina m'appelle, en larmes, pas de nouvelles non plus, je la réconforte, lui dit qu'il ne faut pas enterrer les gens alors qu'ils sont encore en vie.

Maman rentre du marché, énervée: j'en conclus qu'elle est au courant, elle hurle mon prénom "ça va c'est bon, calme-toi, je suis au courant pour Jamel!!" En fait elle n'était au courant de rien, je pensais qu'elle allait tomber dans les escaliers, alors je lui dis que tout va bien, et lui relate la conversation avec Karima. Pleurs. On appelle mamie qui pleure fort, 72 ans, on aurait pu s'en passer, elle tombe, Papa va la chercher.

Le téléphone sonne, c'est Tonton Momo, l'époux de Yamina et frère de ma mère. Je reste à côté de maman, internet refuse obstinément de fonctionner, il faut chercher un aller rapidement pour Oujda: mamie et maman s'en vont, pour... Tonton Momo parle à maman, j'aurais aimé l'avoir en premier au téléphone. Maman tombe par terre en hurlant, elle se frappe le visage, se débat comme un dément, je me mets au-dessus d'elle je la calme, je lui parle, je n'ai versé aucune larme. "Il souffrait, c'est mieux pour lui, Maman calme-toi, papa est malade, mamie arrive, tu risques de les choquer..."

Papa rentre avec mamie, elle tremble, j'ouvre la porte et laisse passer mamie devant, je fais signe à Papa que s'est fini, j'articule silencieusement un 'il est mort!' Papa a compris, il court derrière mamie, lui dit de s'asseoir maman est en larmes, mais pas de changement.

Mamie s'assied: "alors, tu as eu d'autres nouvelles?", maman répond (tout en arabe...) "sincères condoléances, il est mort...". Cris, larmes, tout en même temps, Papa en qui je cherchais du soutien pleure aussi. Je suis seule, debout, tremblante, la petite que Maman garde vient de se réveiller, où donner de la tête? On appelle la famille, j'annonce, doucement. Maman est surprise de ne pas me voir pleurer. Tout le monde arrive, les billets d'avion sont pris, je réserve le TGV pour Paris...

Mon oncle, celui avec qui on se foutait des touristes, le beau gosse que je voyais déjà prof, celui avec qui on devait me marier dans des délires, celui qui m'a toujours défendue, avec lequel je bronzais. Celui avec lequel je n'ai pas parler depuis plus d'un an, car angoissée, réaliste. Celui qu'on disait malade comme enrhumé est mort. A 21 ans. Il devait fêter ses 22 ans en Juin. Mort, mort... plus rien, rien que des larmes, du chagrin et de la rage dans le ventre.

J'ai appris que nul n'est tout-puissant, j'ai appris que d'autres tragédies peuvent me surprendre, alors une éléction présidentielle... J'ai appris à prendre sur moi.

Ma vie ne s'est pas arrêtée aujourd'hui, les seules larmes que j'ai versées c'est face à ma mère, elle m'a fait de la peine, à ma grand-mère et dans ma chambre...

Mon père aussi est malade, et si une maladie grave frappait une de mes soeurs? ma mère? J'ai envie de m'en aller et d'oublier qu'il y a des gens à qui je tiens plus que tout au monde. La peine m'effraie plus que la mort.